L’un des meilleurs moyen de découvrir l’histoire de l’Afrique du Sud et de l’Apartheid en particulier est de s’aventurer dans les rues animées et grouillantes de Soweto, le plus célèbre township d’Afrique du Sud situé aux abords de Johannesburg, Les habitants de Soweto sont tous fiers de leur township qui est un symbole majeur de la lutte contre l’Apartheid et n’hésiteront pas à vous conter l’histoire de ce lieu si particulier.
Soweto, le cœur battant de la révolte contre l’Apartheid
Soweto, l’histoire d’un township sud-africain
Soweto est une abréviation de « South Western Township », qui a fini par devenir le nom officiel de la banlieue aujourd’hui. Créé dans les années 1950, Soweto, comme tous les townships, avait pour but principal d’accueillir la population noire ainsi que tous les autres « non-blancs », à savoir les asiatiques et les « coloured people », terme qui désignait les populations métis, qui n’étaient ni noires, ni blanches, ni asiatiques. Il existait alors quatre classes de populations définies en Afrique du Sud : les Blancs, les Coloured, les Asiatiques et les Noirs. Parfois, les autorités n’arrivaient pas à déterminer à quelle « race » appartenait une personne car sa couleur de peau était un peu ambiguë. On mettait alors un stylo dans les cheveux de cette personne en lui demandant de secouer la tête : si le stylo tombait, la personne était considérée comme blanche et si le stylo restait dans les cheveux, comme noire. Ce test permettait de savoir si une personne serait envoyée ou pas dans les townships…
Durant l’apartheid, les townships ont été construits en périphérie de toutes les grandes villes en tant que lieu d’habitation forcé pour les populations noires, les blancs ne souhaitant pas les côtoyer quotidiennement, une politique de ségrégation qui est au cœur de l’Apartheid, terme qui signifie d’ailleurs « séparation, mise à part » en Afrikaans (langue officielle des Afrikaners, la population blanche descendant des premiers colons européens arrivés en Afrique du Sud au XVIIème siècle).
Ces zones urbaines étaient très pauvres, et les conditions de vie y étaient souvent très rudimentaires. A Soweto, il n’y eut pas d’électricité avant les années 1970, et le charbon était utilisé en grande quantité pour chauffer les maisons, baignant alors les rues dans une épaisse brume grise constante, si bien que le township reçut plusieurs surnoms tels que le « Dark Township » (« le Township Sombre ») ou « Dark and Dusty Township » (le « Township Sombre et Poussiéreux »).
Vivre à Soweto durant l’Apartheid
Sans eau courante ni électricité, la vie à Soweto était loin d’être aisée pour les populations noires. De nombreux hommes de Soweto travaillaient dans les mines, et pour être employés, ils devaient passer des tests d’aptitude physique des plus humiliants : leur pénis était posé sur une table et un coup de marteau était alors donné. La résistance à la douleur déterminait si l’homme était apte ou non à aller travailler dans les mines.
Des couvre-feux avaient été mis en place par les autorités gouvernementales, et obligeaient les habitants à rentrer chez eux avant 18h pour n’en ressortir que le lendemain matin. Des tanks circulaient dans les rues du township pour veiller à ce que la règle soit appliquée.
Pour circuler en dehors de Soweto, les Noirs étaient obligés de porter sur eux un passe ou passeport intérieur, qui consistait en un papier signé par leur employeur ou les autorités compétentes. Les passeports intérieurs étaient surnommés « dumb pass » (« stupide passe » et lors des manifestations contre l’Apartheid, ces passeports furent souvent brûlés dans des buchers de façon symbolique.
Les répressions contre la population des townships était monnaie courante et si un Noir se rendait coupable d’une quelconque faute aux yeux des autorités, les conséquences pouvaient aller du simple emprisonnement à l’exécution. Une des méthodes d’exécutions pratiquées était connue sous le nom de « necklace » (appelé le « supplice du pneu » en français) : un pneu était passé autour du cou d’une personne, puis on versait de l’essence sur elle avant d’y mettre feu pour la brûler vive.
Soweto au cœur de la résistance contre l’Apartheid
Dans les années 50, des mouvements de résistance s’organisent et se propagent dans les quartiers de Soweto, tels que le parti de l’ANC (African National Congress ou Congrès National Africain en français) dont Nelson Mandela deviendra président. Soweto devint alors le cœur de la résistance contre l’oppression par les populations blanches.
En 1976, le gouvernement veut imposer l’afrikaans comme langue officielle dans les écoles de Soweto, ce qui déclencha alors d’importantes manifestations étudiantes dont les images firent le tour du monde à travers les écrans de télévision. Ces émeutes furent violemment réprimées, et près de 700 personnes auraient été tuées. L’une des images les plus célèbres et choquantes de cet évènement est celle de la mort d’Hector Pieterson, un jeune écolier de 13 ans, dont le corps sans vie gît dans les bras d’un autre étudiant, Mbuyisa Makhubo. Un mémorial a été érigé en l’honneur de cette jeune victime et un musée, nommé Hector Pieterson Museum, a été fondé pour remémorer les tristes évènements des violentes manifestations qui commencèrent en ce 16 juin 1976.
Soweto est donc un haut lieu historique, et des traces de cette période se trouvent à tous les coins de rues. Dans un des districts de Soweto, on trouve, chose rarissime, dans la même rue les maisons de deux Prix Nobel de la Paix, le très célèbre Nelson Mandela qui vécut de longues années à Soweto, et Desmond Mpilo Tutu qui, même si sa renommée internationale est moins étendue, fut un acteur majeur de la lutte contre l’Apartheid, admiré par tous les sud-africains aujourd’hui. Ce quartier est souvent surnommé le « Beverly Hills » de Soweto. De plus, on y trouve également la maison de Winnie Madikizela, la seconde épouse de Nelson Mandela, qui vit toujours à Soweto aujourd’hui.
La maison de Nelson Mandela se visite, et dans le jardin, on peut apercevoir deux arbres à l’importance symbolique : les cordons ombilicaux des deux filles qu’il a eu avec Winnie Madikizela ont été enterrés au pied de ses arbres, une tradition très répandue en Afrique du Sud.
Soweto, une banlieue grouillante en quête de renouveau
Soweto est aujourd’hui synonyme de fierté et de prestige pour ses habitants, et rares sont ceux qui le quittent, même s’ils ont les moyens financiers nécessaires pour le faire. De nombreuses mesures sont mises en place à Soweto pour réduire la pauvreté, améliorer le confort des logements, promouvoir l’éducation scolaire et les activités artistiques telles que la musique.
Les habitants de Soweto sont aussi de grands amateurs de football et c’est d’ailleurs dans l’Orlando Stadium, un des stades de foot de Soweto, qu’a eu lieu la cérémonie d’ouverture de la Coupe du Monde de Football en 2010 durant laquelle Shakira a chanté et dansé sur sa célèbre chanson Waka waka.
Deux hautes tours dénommées « Orlando Towers » dominent également le paysage de Soweto. Construites à la base pour la centrale électrique d’Orlando, elle offre aujourd’hui une activité parmi les plus originales : le saut à l’élastique !
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